dimanche 28 janvier 2018

Un médecin patriote comme il ne s'en fait plus

Le Docteur Pierre Martial Bardy (1797-1869)
(Source : Le Docteur Pierre-Martial Bardy,
sa vie, ses oeuvres et sa mémoire
, Québec,
Presses de la Libre Parole, 1907)


Dans le quartier Maizerets de l'arrondissement La Cité-Limoilou, à Québec, se trouvent une avenue et un parc portant le nom de "Bardy", un patronyme qui, de nos jours, ne dit strictement rien à la plupart des gens. 

Comme l'indique la fiche toponymique de la Ville de Québec (voyez ICI), cette avenue et ce parc commémorent Pierre Martial Bardy, un médecin politiquement engagé qui fut actif au 19e siècle dans le secteur Saint-Roch de la Vieille Capitale. 

Depuis longtemps totalement oublié, Pierre Martial Bardy, en plus d'avoir été un médecin dévoué et généreux jusqu'à l'héroïsme, était un patriote exemplaire qui n'hésitait pas à dédier son intelligence et ses talents à la défense de notre nationalité aux heures où de graves périls la menaçaient. 

Ainsi, cet allié et ami intime de Louis-Joseph Papineau, en réaction à l'Acte d'Union qui visait à faire disparaître la nation canadienne-française, fut le président-fondateur de la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec, en 1842, désirant ainsi contribuer au réveil et stimuler l'attachement de nos compatriotes à leur langue, à leur culture, à leurs droits et aux institutions nécessaires à leur sauvegarde.

Bardy oeuvra également en faveur de l'achèvement du Monument aux Braves, inauguré en 1863 dans le Parc des Braves, toujours dans la Vieille Capitale et qui commémore la victoire des troupes françaises, canadiennes et amérindiennes contre l'armée anglaise lors de la Bataille de Sainte-Foy, en 1760. 

Le Monument aux Braves, à Québec, dont Pierre Martial Bardy présida à la réalisation.
(Source : Wikipedia ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Pierre Martial Bardy fut aussi surnommé "le médecin des pauvres", à cause de son dévouement de tous les instants au service du peuple ouvrier du quartier Saint-Roch. Comme on peut le lire dans l'article que lui consacra l'historien et journaliste Laurent-Olivier David, et que ces Glanures mettent ci-dessous à votre disposition, l'engagement du Dr Bardy au service de ses patients dépassait l'abnégation et reflète les valeurs profondes d'un humaniste conséquent pour qui le don du meilleur de lui-même à ses compatriotes était un devoir sacré. 

Malgré tout le bien qu'il aura fait, il fallut quand même peu de temps pour que, après sa mort en 1869, le nom de Pierre Martial Bardy sombre dans l'oubli, et ce, même au sein des sociétés patriotiques et nationales dont il fut pourtant l'un des plus dévoués animateurs. 

Sa fille, qui fut l'unique survivante de ses sept enfants, Célina Bardy Valin (dont on peut lire un beau poème ICI), s'est beaucoup démenée pour corriger cette injustice faite au souvenir de son père. Elle fit notamment publier, en 1907, un livre, intitulé Pierre Martial Bardy, sa vie, ses oeuvres et sa mémoire, qui contient divers articles et discours de son père, de même que plusieurs lettres et articles à son sujet. 

Cet ouvrage contient l'article de Laurent-Olivier David que voici, et dont la lecture nous fait réaliser à quel point nous avons collectivement perdu, du moins dans nos élites, certaines valeurs essentielles à la survie de toute nationalité, comme le patriotisme, la solidarité et le dévouement envers nos compatriotes, valeurs qu'incarnait profondément le Dr Pierre Martial Bardy, un médecin et patriote comme il ne s'en fait plus de nos jours. 

Donc, plus d'un siècle après la mort, en 1914, de la fille de Pierre Martial Bardy qui oeuvra avec tant d'ardeur afin que la contribution de son père ne reste pas oubliée, ces Glanures prennent à leur tour le relais en vous présentant ce sympathique personnage dont le souvenir, en vous touchant et en vous inspirant, pourra reprendre vie :  

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Pierre Martial Bardy

par Laurent-Olivier David

Laurent-Olivier David
(Source : Projet Gutenberg)

Le véritable mérite ne consiste pas à faire le plus de bruit et à soulever le plus de poussière sur son passage. Être bon citoyen [...] tous les jours de sa vie est plus difficile et méritoire que de l'être une fois par hasard, que d'accomplir un acte éclatant de patriotisme ou de vertu. Beaucoup d'hommes peuvent dans un moment d'enthousiasme, sous l'empire d'une grande passion, faire une action remarquable, héroïque même. Mais il en est peu qui puissent montrer comme le Dr Pierre-Martial Bardy une vie entière de bonnes oeuvres, qui aient la continuité du dévouement et du sacrifice. [...]

Après avoir fréquenté plusieurs écoles élémentaires, Pierre-Martial Bardy entra au Séminaire de Québec en 1811. Quatre ans après, il terminait sa rhétorique sous Mr Hyppolite Hudon. [...]

En philosophie, Pierre-Martial Bardy et Elzéar Bédard furent les deux plus brillants élèves de leur classe. Tous deux prirent la soutane et reçurent en même temps la tonsure de Mgr Plessis. Le jeune Bardy, devenu orphelin à l'âge de quatorze ans, seul, sans protection et sans ressources, s'était senti peu attiré vers le monde. L'état ecclésiastique seul, d'ailleurs, paraissait capable de satisfaire sa nature généreuse, son amour du bien. Pendant deux ans, il étudia la théologie au Séminaire de Québec et enseigna les belles-lettres et la rhétorique. 

Parmi les hommes distingués qui furent ses élèves, citons : Sir Narcisse Fortunat Belleau, l'illustre et honnête Augustin-Norbert Morin, le juge Bossé, le recorder Jacques Crémazie, M. le Grand-Vicaire Mailloux, etc. 

Étant allé visiter, pendant les vacances, Messire Louis Bardy, curé de La Présentation, son oncle, le vénérable abbé le décida à renoncer à l'état ecclésiastique pour entrer dans le monde. Le jeune clerc hésita, réfléchit beaucoup et finit par se rendre aux conseils du bon prêtre. 

Dans l'automne de 1821, on le trouve à Boucherville, où l'abbé Tabeau l'avait appelé pour ouvrir une classe de latin. [...] 

Le cinq février 1822, il épousa Mlle Marie Marguerite Archambault, de La Présentation. 

Comprenant que l'enseignement, dans un pays comme le nôtre, était la carrière la plus ingrate, il se décida à étudier la médecine, s'imposa beaucoup de privations, pratiqua l'économie comme on savait la pratiquer à une époque où des hommes distingués vivaient avec quatre ou cinq cents piastres par année, et eut, en 1829, le bonheur d'être reçu médecin après un examen des plus brillants. [...]

Il s'établit d'abord à Saint-Jacques et ensuite à Saint-Athanase et se fit en peu de temps une telle réputation, qu'une députation composée des citoyens les plus influents de Québec fut envoyée auprès de lui pour le prier de venir s'établir à Québec. Il ne voulut pas abandonner sans raison les gens au milieu desquels il vivait heureux, estimé, et ne se décida que plusieurs années plus tard à aller se fixer à Saint-Roch de Québec. 

Les labeurs d'une grande clientèle ne pouvaient empêcher un homme comme le Dr Bardy de s'occuper des affaires du pays, à une époque où le patriotisme unissait sous le même drapeau tous les amis de la liberté. Son patriotisme était aussi connu que son habileté médicale. Partisan et admirateur de Louis-Joseph Papineau, il approuvait hautement sa politique de résistance et travaillait de toutes ses forces à son triomphe. 

Aussi, aux élections générales de 1834, le Dr Bardy, croyant que les hommes d'influence devaient payer de leur personne et donner l'exemple du patriotisme, consentit à accepter la candidature du comté de Rouville. La votation dura quinze jours ; les bureaucrates furent battus à plate couture par les deux candidats patriotes Bardy et Careau

Le Dr Bardy prit place dans la Chambre au premier rang de la phalange libérale qui, serrée autour de son vaillant chef, lutta corps à corps dans les sessions de 1835 et 1836 contre les ennemis de nos libertés politiques. Personne n'était plus dévoué à M. Papineau. Un jour, voyant le tribun, qui venait de parler pendant trois heures, attaqué avec fureur par les députés bureaucrates, il se leva pour le défendre, et le fit avec tant de succès que M. Papineau, cédant à l'émotion générale, s'élança d'un mouvement généreux et spontané vers son ami, et lui dit en lui serrant la main :

« Mon vaillant ami, vous m'avez non seulement rendu un service signalé, mais vous vous êtes encore fait bravement et noblement le champion des intérêts sacrés de notre patrie. Aussi que notre amitié se resserre davantage, et je vous assure que si cette fois est la première que je vous cède ma place, elle ne sera certainement pas la dernière ». 


M. Papineau rendait au Dr Bardy confiance pour confiance, amitié pour amitié. Il l'appelait l'un de ses meilleurs amis. [...]

Le Dr Bardy se fatigua vite de la politique. Il fallait à son esprit studieux, à son âme douce et paisible, une vie plus tranquille. 

Voulant se consacrer à l'exercice de sa belle profession sur un théâtre digne de sa noble ambition et de ses talents, il alla se fixer à Saint-Roch de Québec, au milieu de cette brave population aux fortes passions, à la tête un peu chaude quelquefois, mais au coeur si bon, si généreux, où l'âme et le corps offrent un champ si vaste aux opérations de l'homme de bien et de science. 

À peine fut-il arrivé dans la Vieille Capitale que sa maison fut assiégée. Ils n'étaient que deux médecins, lui et le Dr Rousseau, pour satisfaire aux besoins de la clientèle, et il en aurait fallu quatre. Sa bonté, son zèle, son affabilité, ses succès, lui firent bientôt une réputation considérable. Tout entier à ses devoirs, infatigable et d'une patience admirable, partant au premier appel, il n'a, pendant des années, dormi que trois ou quatre heures par nuit. Pendant vingt-cinq ans, le Dr Bardy a été le serviteur dévoué de cette rude population de travailleurs de Saint-Roch ; pendant vingt-cinq ans, il s'est livré corps et âme à son service et a réalisé au milieu d'elle le type admirable du médecin tel que représenté dans le drame et le roman du "Médecin des pauvres". 

Quelques traits, pris au hasard entre mille, donneront une idée de sa charité. 

Un jour, on l'appelle dans une pauvre famille atteinte du typhus. Le père, la mère et les cinq enfants, en proie au terrible fléau, étaient devenus des objets d'horreur pour leurs meilleurs amis, leurs plus proches parents ; tout le monde les fuyait. Le bon docteur est touché de compassion ; il s'installe, en quelque sorte, au chevet de ces infortunés ; et non seulement il leur donne tous les secours de son art, mais les voyant dans le plus complet dénuement, il les nourrit, leur porte tous les jours du linge, des aliments, des bouillons, tisanes et autres potions, que son excellente femme, pour être de moitié dans sa charité, préparait de ses propres mains. Poussant le dévouement jusqu'à ses plus extrêmes limites, lui, l'homme délicat par excellence qu'une femme et une fille chéries traitaient comme un enfant, il donnait à cette famille abandonnée ces soins intimes qui répugnent aux natures les plus fortes. Il disputa à la mort avec acharnement ces pauvres gens et ne cessa de combattre que lorsqu'il eut remporté une victoire complète. 

Cette victoire faillit lui coûter cher ; le terrible fléau l'atteignit lui-même ; un moment il fut entre la vie et la mort. La mort, heureusement, eut honte de briser une pareille existence, d'enlever aux pauvres leur providence. Il guérit et se remit au travail. 

Il avait un vieux serviteur, « le père Beaumont », qui passait la plus grande partie de son temps à porter à droite et à gauche les aumônes de son maître. Un jour, le père Beaumont perdit patience et dit au bon docteur : 

« Écoutez donc, pensez-vous qu'à mon âge je puis continuer longtemps encore à courir après tous les quêteux de la ville pour leur porter vos paquets, à monter et descendre des escaliers avec des paniers chargés ? Tous les jours, du matin au soir, c'est la même chose : je n'arrête pas ! »

« C'est vrai, père Beaumont, ce que vous dites là. Eh ! bien, quand vous ne pourrez plus marcher, je prendrai votre place ; j'irai moi-même, si ma vilaine jambe cassée me le permet, porter à ces pauvres gens ce qu'il leur faut ». 

L'une de ses dernières pensées, l'un de ses derniers battements de coeur, fut pour les pauvres. Sur son lit de mort, il biffa dans ses livres les comptes d'un grand nombre de personnes, et fit promettre à son épouse de ne jamais inquiéter ces pauvres gens. C'était sa dernière aumône ; elle représentait quatre mille cinq cents à cinq mille dollars (Note des Glanures : une somme considérable à l'époque)

Sa probité était aussi grande que sa charité. Un jour, deux personnes se présentent à son bureau et lui offrent cinq cents piastres s'il voulait seulement répondre en deux mots à une certaine question délicate. Elles n'avaient pas fini d'exposer leur affaire que le Dr Bardy, se levant indigné, leur disait de passer la porte. Le cas, pourtant, n'était pas grave ; pour cinq cent piastres aujourd'hui, beaucoup de médecins ne se feraient pas scrupule de répondre à une pareille question. 

L'instruction publique n'a pas eu, dans notre pays, de partisan plus dévoué, de protecteur plus généreux ; elle a été, après la médecine, le principal objet de ses études et de son dévouement. Nommé Inspecteur des écoles en 1852, il a rempli les devoirs de cette charge avec un zèle et une intelligence qu'attestent ses nombreux écrits et discours. Que de jeunes gens appartenant à toutes les classes de la société lui doivent leur éducation ! 

Toutes les oeuvres qui avaient pour but d'instruire et de rendre le peuple meilleur et plus heureux trouvaient en lui un protecteur aussi ardent qu'éclairé. Comme il ne perdait jamais un instant, il trouvait le temps de tout faire, de s'occuper d'une foule de bonnes choses en dehors de sa profession. Bon écrivain, orateur agréable, fort instruit, il a écrit et parlé avec talent sur les sujets les plus variés, entre autres : la médecine légale ou jurisprudence médicale, la physique organique et inorganique, l'éducation des idiots et des imbéciles, les bienfaits de l'instruction publique, etc. 

La plus belle de ses oeuvres, la preuve la plus éclatante de son patriotisme, fut la fondation, à Québec, de la belle Société Saint-Jean-Baptiste. 

M. Ludger Duvernay avait, en 1834, à une époque de luttes et de dangers, jeté les fondements de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. 

En 1842, au lendemain de l'Acte d'Union destiné à nous perdre, le Dr Bardy crut avec raison que les Canadiens-français n'avaient pas moins besoin qu'en 1834 de s'unir pour recommencer le combat de la liberté. Le 19 juin de cette année, dans une nombreuse assemblée [...] au faubourg Saint-Roch, le Dr Bardy démontrait la nécessité de fonder une grande association pour célébrer la Saint-Jean-Baptiste. Sa proposition fut acceptée avec enthousiasme ; on jeta immédiatement les fondations de la nouvelle société ; le Dr Bardy fut nommé président et M. Napoléon Aubin, l'un des fondateurs, vice-président. 

Quelques jours après, la Saint-Jean-Baptiste était célébrée pour la première fois dans les murs de Québec. La vieille cité de Champlain, couronnée de fleurs et de drapeaux, fut belle et joyeuse comme une fiancée le jour de ses noces : jamais elle n'avait paru si jeune. Une grand'messe des plus solennelles fut célébrée, et le sermon du jour fut prononcé par l'ex-abbé Chiniquy. On ne pouvait, dans le temps, choisir une voix plus éloquente. 

Après la messe, il y eut procession à travers les principales rues de la ville, au milieu d'une population enthousiaste ; et le soir, un banquet magnifique réunissait deux cents convives. [...] Les orateurs de circonstance furent : le Dr Bardy et MM. Cauchon, Chauveau, Belleau, Aylwin, Étienne Parent, Auguste Soulard et F. M. Derome. Inutile de dire, après avoir cité ces noms, que les discours furent éloquents. 

Ce fut un jour de joie et de gloire pour la Société Saint-Jean-Baptiste et pour son dévoué fondateur et président, le Dr Bardy. Pendant plusieurs années, la Société ne voulut pas avoir d'autre président. Le Dr Bardy vit avec fierté grandir et se développer, grâce à ses soins constants, à son travail persévérant, cette enfant chérie de son patriotisme. 

Mentionnons encore, parmi les oeuvres que Québec lui doit en grande partie, l'érection du monument de Sainte-Foy. 

On avait posé en 1855 la pierre angulaire de ce monument destiné à honorer la mémoire des braves soldats tombés dans la dernière bataille des plaines d'Abraham. Cinq ans après, en 1860, il n'était pas encore achevé, faute d'argent. Le Dr Bardy était alors redevenu président de la Société Saint-Jean-Baptiste. Il entreprit de compléter cet hommage de reconnaissance nationale et se mit à l'oeuvre avec l'activité et la persévérance qui le caractérisaient. Pendant trois ans, il écrivit, parla, mendia des souscriptions, devint importun même à force de sollicitations. Enfin, en 1863, il eut le bonheur de voir le couronnement de ses travaux, d'assister à l'inauguration du magnifique monument de Sainte-Foy, dans une démonstration publique et nationale à jamais mémorable. 
Le Monument des Braves, vers 1900.
(Source : Le Dr Pierre Martial Bardy,
sa vie, ses oeuvres et sa mémoire
;
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Comme on le voit, le Dr Bardy était doué des qualités précieuses ― trop rares parmi nous ― qui constituent l'homme d'action. Il ne se bornait pas à écrire et à parler, à dire sur tous les tons qu'il fallait faire telle ou telle chose, mais il la faisait, il agissait. 

Il mena une vie active jusqu'au dernier moment, ménageant peu ses forces et sa santé. Il mourut le 7 novembre 1869, à l'âge de 72 ans, après avoir reçu les derniers sacrements avec ferveur et avoir fait des adieux touchants à sa famille et ses amis. 

Presque toute la presse du pays fit l'éloge de ses vertus et de son patriotisme, et le Dr Joseph Painchaud ― un autre bon citoyen ― jeta sur sa tombe, en guise de fleurs, les belles paroles qui suivent : 

« La Société vient de perdre un de ses plus dignes membres ; je perds, moi, mon intime ami ; il m'a rendu de grands services ; je ne l'ai pas abandonné durant sa longue et douloureuse maladie. [...] Le Dr Bardy a été tendre époux, bon père, bon citoyen, bon médecin et bon chrétien. Les pauvres pleureront sur sa tombe ; c'est un bel éloge. Je laisse à d'autres le soin de parler des fonctions publiques qu'il a remplies avec tant de zèle ».

De son premier mariage, le Dr Bardy avait eu sept enfants, dont l'un, le Dr Louis-Eusèbe Bardy, de Saint-Roch de Québec, mourut quelques semaines après son père. En 1840, il épousa en secondes noces Mlle Marie S. Lefebvre, de Saint-Vallier, et eut de ce mariage deux filles, dont la plus jeune, Mademoiselle Célina, est la seule survivante de tous les enfants du Docteur. 

Nous regrettons de ne pouvoir publier la lettre que Mademoiselle Bardy écrivait à une amie, quelques jours après la mort de son père. Si cette belle lettre fait l'éloge du défunt, elle fait aussi honneur à l'épouse et à la fille dévouée qui l'ont tant aimé ; elle montre qu'au patriotisme et à l'amour du bien, le Dr Bardy joignait ces aimables qualités qui rendent un homme cher à tous ceux qui le connaissent intimement ou qui vivent avec lui. 
Célina Bardy Valin (1843-1914)
 fille de Pierre Martial Bardy
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« C'était, disait un journal anglais, un homme de la vieille école, gai, affable et hospitalier, dont l'esprit et les manières rappelaient les vieux gentilshommes français ». 

Enthousiaste, franc, ouvert, disant volontiers tout ce qu'il pensait, entreprenant, hardi comme tous les hommes d'action, il devenait un peu déclassé dans ses dernières années, à une époque où l'on commençait à n'admirer que les esprits froids, à accuser d'excentricité les coeurs enthousiastes.

Pourtant, c'est grâce à l'enthousiasme, aux nobles impulsions du coeur, que les hommes comme le Dr Bardy font de grandes et bonnes choses. Incompris quelquefois pendant qu'ils vivent, la postérité les venge en leur élevant des monuments. [...]

Extraits de l'article de L.-O. David publié dans : Le Docteur Pierre-Martial Bardy : sa vie, ses oeuvres et sa mémoire, compilation par l'abbé F. X. Burque, Québec, Presses de La Libre Parole, 1907, p. 249-263.

Le livre que la fille du Dr Bardy fit publier afin de 
rappeler son souvenir.
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